L'histoire des bussolai de Burano, de la tradition familiale au patrimoine collectif

10 November 2021

Venise, 20 octobre 2021 - Le réveil à l'aube, les grains de farine dans l'air, l'odeur du beurre fondu, la chaleur des fours allumés. Entrer dans la pâtisserie historique de Carmelina Palmisano à Burano signifie entrer dans un monde fait de traditions anciennes, de passion et, surtout, de liens familiaux. Giorgio Senigallia, le mari de Carmelina, propriétaire de l'entreprise et pâtissier depuis l'âge de dix ans, le sait bien : c'est ici qu'un garçon qui devait apprendre un métier est devenu un homme, un pâtissier, un mari et un expert en bussolai.

"Autrefois, c'était comme ça, quand on finissait l'école, on allait travailler pour apprendre un métier", raconte le pâtissier Giorgio Senigallia, "Tommaso Palmisano, qui deviendra plus tard mon beau-père, m'a tout appris. J'ai d'abord appris à être boulanger, puis pâtissier, et aujourd'hui, à 82 ans, je suis toujours là".

Aujourd'hui, la tradition de ces biscuits brisés, qui font partie des 1600 ans d'histoire de Venise, s'est répandue au-delà de l’île de Burano dans plusieurs pays du monde. Mais tout a commencé il y a plus de 90 ans, avec deux frères qui aimaient humer l'odeur du pain et des biscuits, mettre les mains dans la pâte et voir les yeux des gens briller lorsqu'ils goûtaient l'une de leurs créations.

C'est au cours des années 1920 qu'une famille originaire de la Basilicate s'est installée d'abord à Caorle, puis à Burano. Différences culturelles et d’habitudes, du sud de l'Italie à une île traversée par de petits canaux et aux maisons colorées : il y avait beaucoup de nouvelles choses auxquelles il fallait s'habituer, mais l'amour pour le pain et pour les gâteaux est quelque chose d'universel, unissant les gens par le simple arôme de la vanille ou le parfum d'une miche de pain fraîche. C'est ainsi que deux frères, avec le sud de l'Italie dans le sang mais qui ont grandi parmi les pêcheurs d'une petite île de la lagune vénitienne, ont choisi en 1926 de fonder deux boulangeries, qui sont ensuite devenues les pâtisseries historiques toujours présentes dans la ville et qui ont contribué à la diffusion de la tradition pâtissière des bussolai, qui restent l'un des symboles de Venise dans le monde.

Autrefois gâteaux typiques d'une seule période de l'année, ces biscuits sont aujourd'hui fabriqués quotidiennement et ils se trouvent sur les étagères de presque tous les magasins vénitiens et de la région. Qu'ils soient ronds ou en forme de "S", simples comme le veut la tradition ou fourrés, comme c'est la coutume aujourd'hui, les bussolaiplaisent à tous et apportent la saveur de Venise partout dans le monde.

"La production des bussolai telle que nous la connaissons aujourd'hui a commencé après la guerre, avec l'avènement du tourisme", souligne Giorgio Senigallia, "mais il s'agissait de gâteaux que toutes les familles de Burano préparaient une fois par an, dans les jours précédant Pâques, puis, une fois préparés, ces biscuits étaient portés dans l'une des quatre boulangeries de la ville pour être cuits dans les fours, puis ils étaient stockés et consommés le dimanche de Pâques".

La tradition veut que le bussolà soit rond, tandis que la variante en forme de "S", la plus célèbre aujourd'hui, est apparue plus tard. La taille peut varier, mais la recette originale de ces biscuits a restée inchangée. La base est simple, elle commence par une pâte brisée très grasse avec beaucoup de beurre, des jaunes d'œufs, du sucre, de la farine et un peu d'arôme de vanille.

Sur un kilo de farine, il y a 12 jaunes d'œufs, 6 cent grammes de sucre et 3 cent grammes de beurre. Le mélange est pétri sans eau ni rien d'autre, à sec. Ensuite, une fois qu'il est bien mélangé, les petits morceaux de pâte sont roulés et réunis pour former un cercle, si l'on veut faire un bussolà rond, ou déformés jusqu'à prendre la forme d'une "S" pour cette autre variante de biscuit. 

"Ici à Burano nous continuons à tout fabriquer à la main, comme dans le passé, et nous fabriquons des bussolaiplus grandes. Mais pour répondre aux besoins de la grande distribution, nous avons dû utiliser de machines, et c'est pour cette raison que nous avons créé à Jesolo un laboratoire de confiserie qui s'en occupe et où ma fille perpétue le métier".

D'une tradition typiquement pascale, ce biscuit à la vanille est devenu une habitude quotidienne, avec le même goût ancien et la même consistance parfumée qui laissent dans la bouche le goût de Burano et de son histoire.

 

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