Venise, 4 janvier 2022 - Les voir est un événement unique et rare. À Venise, les trois Rois Mages sont représentés par les statues marquant 12 heures de la Tour de l'horloge de la place Saint-Marc : une lente procession qui a lieu depuis le seizième siècle et fait partie des célébrations du 1600ème anniversaire de la naissance de la ville.Pour admirer l'œuvre d'art qui annonce l'Épiphanie, il faut se rendre deux fois par an en place Saint-Marc : le 6 janvier à midi ou le jour de l'Ascension. Il suffit de lever les yeux vers la Tour et sa grande horloge astronomique, l'un des monuments architecturaux les plus célèbres de Venise, un chef-d'œuvre de technologie et d'ingénierie qui marque la vie, l'histoire et le passage continu du temps depuis cinq cents ans.
Il s'agit de statues mécaniques en bois : un ange jouant de la trompette et les trois Rois Mages qui, entraînés par un mécanisme à rail le long de la plate-forme semi-circulaire au-dessus du cadran de l'horloge, sortent du panneau des heures, passent devant la Vierge avec l'Enfant, puis rentrent dans la Tour par le panneau des minutes, du côté opposé de l'horloge. Les statues ne sont pas les originaux de 1499 mais une copie fidèle, réalisée en 1755 par Giobatta Alviero.
En 1499, lors de la construction de la Tour de l'horloge, les trois Rois Mages et l'ange à la trompette devaient sortir à chaque heure de la loggia du deuxième étage et défiler en procession devant la statue de la Vierge avec l'Enfant. Cependant, la complexité délicate du mécanisme et l'usure ont entraîné une réduction de la fréquence de la procession des Rois Mages. Après que Bartolomeo Ferracina a créé la nouvelle machine et reconstruit le mécanisme de la procession, les Rois Mages ont été remis en service avec le même mécanisme qui les déplace encore aujourd'hui lors des fêtes de l'Épiphanie et de l'Ascension.
À l'époque de la Sérénissime République, la période entre Noël et l'Épiphanie ne marquait pas le passage à la nouvelle année, qui avait lieu le 1er mars selon l'ancien calendrier romain. Dans les territoires de l'État vénitien, en effet, jusqu'en 1797, le calcul du calendrier se faisait "More Veneto", c’est-à-dire "selon l'usage vénitien, à la manière vénitienne" et les dates étaient abrégées par les initiales "MV". Le jour de l'Épiphanie, le Doge assistait à la messe solennelle à Saint-Marc, tandis qu'à l'extérieur de la basilique, les enfants se pressaient pour participer à la procession vers San Zaccaria, où les religieuses ouvraient les portes du couvent pour distribuer des bonbons, de la pâte d'amande et des beignets. Cette tradition ne s'est jamais perdue, elle s'est seulement transformée : aux dix-septième et dix-huitième siècle, on faisait les vitrines avec des bonbons, des corbeilles de fruits et des jouets. On dit que même les nobles aimaient cette tradition : par exemple, la famille Labia du quartier de San Geremia a été la première à avoir l'idée d'offrir des jouets, des bonbons et des fruits aux enfants de la paroisse. Plus tard, les familles Contarini, Michiel, Mocenigo, Piovene et Pisani ont également suivi cet exemple, perpétuant ainsi la tradition dans la ville.
L'Epiphanie à Venise a également une "vieille dame spéciale" : la Marantega, un nom qui dériverait du latin "Mater Antiqua". Et aujourd'hui encore, le 6 janvier, les Befane Maranteghe descendent sur le Grand Canal pour la traditionnelle régate, organisée par les Canottieri Bucintoro, qui en est à sa 43ème édition. C'est l'un des événements sportifs les plus attendus de la ville et il attire chaque année un public nombreux. La compétition implique 5 membres de plus de 50 ans, infailliblement habillés comme la Marantega, chacun à bord de sa mascareta avec un balai.