Venise, 4 octobre 2021 - Expérience, méticulosité et nombreuses heures de travail. Le remèr (terme qui signifie un artisan spécialisé dans la production de rames) est un ancien artisanat vénitien qui a survécu à l'avènement de l'industrialisation et de la technologie. C'est un travail manuel et solitaire, où les callosités des mains marquent le temps et la fatigue. Essentiel dans la Venise du passé, lorsque la mobilité de la ville se faisait entièrement à la rame, mais toujours important aujourd'hui, car il fait partie d'une histoire et d'une culture qui veut continuer à exister et à se raconter.
À l’occasion du 1600ème anniversaire de Venise, l’Association "El Fèlze" a choisi de raconter l'histoire et les secrets des métiers artisanaux liés à la construction des gondoles dans une série de rencontres intitulées "Storie sotto el Fèlze", prévues jusqu'au 7 novembre. Le nom même de l'association est un hommage à la Venise du passé et à l'un de ses symboles disparus, le fèlze, c’est-à-dire la cabine mobile au centre de la gondole. Squeri, botteghe et remiere seront l’arrière-plan des histoires de l'artisanat vénitien racontés par les mêmes artisans qui travaillent encore dans la ville ; il y aura aussi différents rendez-vous ouverts aux curieux et aux passionnés de ces métiers anciens mais fascinants.
"Il est important de parler de nous aux gens", dit Saverio Pastor remèr de profession et membre de l'Association "El Fèlze", "et nous voulons le faire directement sur nos lieux de travail, afin de leur montrer nos métiers et de leur rappeler les métiers qui n'existent plus, comme les felzèri ou les conzafèlzi. Nous le faisons depuis un certain temps, mais cette année, notre travail de diffusion est encore plus spécial car il s'inscrit dans le cadre des célébrations du 1600ème anniversaire de la naissance de Venise et, par conséquent, de nos propres métiers".
Faisant partie d'un patrimoine culturel toujours vivant dans la ville, Pastor passe ses journées avec du bois dans les mains. Il sculpte, lisse, polit et donne une nouvelle vie aux rames et aux forcole (dames de nage typiques de Venise) usées par le temps et l'eau. Il est devenu remèr en commençant par être apprenti et en apprenant, au fil du temps, des erreurs et des enseignements de son maître, à manier la rugosité du bois, matériau qu'il connaît désormais parfaitement.
"Dans le passé, on devenait artisan en suivant la mariegola dei remeri", commente Pastor, "c’est-à-dire le livre qui réglementait ce métier, qui disait que les apprentis devaient travailler pendant une période de cinq ans sans rémunération, à l'issue de laquelle ils devaient passer un examen qui, s'il était réussi, leur permettait d’être salariés. Ce n'est qu'après cinq années supplémentaires qu'il était possible de passer un autre examen pour être reconnu comme maître, obtenir une augmentation et ouvrir un atelier".
Un remèr professionnel passe des heures et des heures en compagnie de pièces de bois et d'outils tels que la scie à ruban, la ponceuse, la hache, le grattoir, mais ce qui compte le plus, dans ce métier, c'est la sensibilité des mains et l'œil qui suit les traces de ceux qui, avant lui, lui ont enseigné cet art.
"Il faut huit à dix heures pour fabriquer une rame", précise Pastor, "pour une forcola, selon le modèle, il faut cinq à quarante heures. On commence avec un quart de rondin et on finit par créer un objet qui, dans le passé, n'était qu'un support pour l'aviron mais qui, aujourd'hui, est considéré comme une véritable œuvre sculpturale. Cependant, les heures de travail, les efforts et l'engagement sont toujours récompensés par la grande satisfaction de continuer à perpétuer un morceau d'histoire et de tradition vénitienne".
Pour les prochains événements de "Storie sotto el Fèlze" et pour plus d'informations sur l'Association "El Fèlze", visitez le site https://www.elfelze.it/storie-sotto-el-felze/.